Régression de la RDC

Le pays perd une place dans le nouveau rapport de la Banque mondiale. Mais il est classé parmi les dix économies qui ont entrepris des réformes dans le domaine des affaires entre juin 2013 et juin 2014.

Célestin Vunabandi, ministre du Plan.
Célestin Vunabandi, ministre du Plan.

Le Groupe de la Banque mondiale a publié, le 29 octobre, son rapport annuel qui classe 189 pays du monde en fonction de leurs aptitudes à améliorer le climat des affaires. Intitulé « Doing Business 2015 : au-delà de l’efficience », le nouveau rapport place la République démocratique du Congo à la 184ème place, contrairement à 2014 où elle était classée 183ème. Malgré ce recul, l’institution de Bretton Woods note, tout de même, que la RDC figure parmi les 10 économies, sur les 189, qui ont le plus amélioré leur environnement des affaires entre juin 2013 et juin 2014. Parmi ces dix économies, cinq appartiennent à l’Afrique subsaharienne. La RDC et la Côte d’Ivoire ont entrepris chacune des réformes dans cinq domaines respectifs. Le pays a rendu plus facile la création d’entreprise en mettant en place un guichet unique. « L’agence d’électricité de Kinshasa a permis le raccordement à cette énergie beaucoup plus accessible en réduisant le nombre d’autorisations nécessaires pour les nouvelles connections et en allégeant le fardeau qu’était le coût de la caution », peut-on lire dans le rapport. Aussi, le pays a-t-il amélioré l’accès à l’information sur le crédit avec l’établissement d’un registre. La loi sur la protection des investisseurs minoritaires en imposant la nécessité d’informer le conseil d’administration des opérations entre personnes ou entités apparentées a été également renforcée. Les actionnaires peuvent désormais consulter les documents relatifs à ces opérations et nommer des commissaires aux comptes chargés de l’examen et de la vérification de telles transactions, précise la Banque mondiale. En outre, le rapport note que la RDC a rendu plus facile le processus de paiement des impôts pour les entreprises en simplifiant les déclarations d’impôt sur le revenu des sociétés et en abrogeant la loi sur le paiement du montant minimum imposé en fonction de la taille de l’entreprise. Sur la liste des dix pays réformateurs figurent également le Togo, le Sénégal, le Bénin, Trinité-et-Tobago, l’Azerbaïdjan, l’Irlande, le Tadjikistan et les émirats arabes unis. Ces états ont mis en œuvre un total de 40 réformes facilitant la pratique des affaires.

Des craintes justifiées      

Les réformes congolaises, citées dans ce nouveau rapport, n’ont toutefois pas influencé positivement la position de la RDC dans le classement général. Les experts de la Banque mondiale qui s’étaient réunis en mars, à Kinshasa, dans le cadre de la clôture de leurs consultations relatives à la rédaction du rapport 2015, craignaient déjà une régression du pays. Ces craintes étaient fondées sur la léthargie qui avait caractérisé le gouvernement, après l’annonce par le président de la République de la mise en place d’un gouvernement de cohésion nationale. « Le gouvernement en place, réputé démissionnaire, ne gère que les affaires courantes et ne peut, à fond, engager l’état. Cette incertitude, depuis le troisième trimestre de l’année dernière, a même entraîné l’arrêt de certaines réformes entreprises avant cette annonce et qui demandent une forte implication de l’état », a expliqué un expert de la Banque mondiale. Des craintes qui sont aujourd’hui justifiées par le mauvais classement du pays. Les auteurs du rapport ont également constaté que le pays a augmenté le taux de l’impôt minimum forfaitaire appliqué au chiffre d’affaires annuel et les frais liés au permis de construire ou encore à l’obtention de ce document. En octobre 2013, la RDC avait obtenu de mauvaises notes dans le rapport 2014, notamment en ce qui concerne la création d’entreprise, la connexion à l’électricité, le transfert de propriété et le permis de construire. Le ministre du Plan, Célestin Vunabandi, avait critiqué ce rapport qui, selon lui, n’avait pas tenu compte de l’ensemble des réformes entreprises par le gouvernement, à travers son Comité de pilotage pour l’amélioration du climat des affaires et des investissements (CPACAI), dont il est le président.  Pour lui, la RDC avait réalisé plus de quinze réformes en fonction des indicateurs mis en exergue par Doing Business, dont certaines n’ont pas été prises en compte dans le classement 2014.

Domaines ciblés par le rapport       

Le Doing Business, rapport annuel phare de la Banque mondiale, examine les réglementations qui affectent les différentes étapes de la vie d’une entreprise dans un pays. Actuellement, il mesure celles qui touchent onze domaines de la vie de l’entreprise. Dix de ces domaines sont inclus dans le classement de cette année, à savoir la création d’entreprise, l’octroi de permis de construire, le raccordement à l’électricité, le transfert de propriété, l’obtention de prêts, la protection des investisseurs minoritaires, le paiement des impôts, le commerce transfrontalier, l’exécution des contrats et règlements d’insolvabilité. Doing Business mesure également la régulation du marché du travail, ce qui n’est pas inclus dans le classement 2015 et répertorie 230 réformes qui touchent l’environnement des affaires. Entre juin 2013 et juin 2014, le rapport a compté 145 réformes visant à réduire la complexité et le coût qui affectent l’environnement des affaires, et 85 réformes permettant de renforcer les institutions juridiques. L’Afrique subsaharienne représente le plus grand nombre des états qui ont appliqué les quarante réformes, soit cinq pays sur les dix. Cette région a aligné, dans la dernière année, 75 réformes sur 230 dans le monde. Plus de 70 % de ses économies ont réalisé au moins une réforme.

Collecte des données       

Pour la première fois cette année, Doing Business a recueilli des données pour une deuxième ville dans onze économies de plus de 100 millions d’habitants : le Bangladesh, le Brésil, la Chine, l’Inde, l’Indonésie, le Japon, le Mexique, le Nigeria, le Pakistan, la Fédération de Russie et les états-Unis. La ville ajoutée permet une comparaison infranationale et l’analyse comparative par rapport aux autres grandes villes. Le rapport conclut que les différences entre les villes sont plus fréquentes dans les indicateurs mesurant les étapes, les délais ainsi que les coûts pour effectuer des opérations de régulation où les agences locales jouent un rôle plus important. Des études de cas mettant en évidence les bonnes pratiques dans huit des domaines mesurés par l’indicateur Doing Business sont présentées dans le rapport. Il s’agit de l’efficacité croissante des registres de sociétés dans le cadre de la création d’entreprise, le zonage et la planification urbaine pour l’octroi de permis de construire, la mesure de la qualité de l’administration foncière en ce qui concerne le transfert de propriété, l’importance des registres dans l’obtention de prêts, les conséquences des transactions avec des parties liées concernant la protection des investisseurs minoritaires, les conséquences de la crise financière sur le paiement des impôts, l’efficacité judiciaire soutenant la liberté contractuelle dans le cadre de l’exécution des contrats et la mesure de l’efficacité des législations relatives à l’insolvabilité à propos de son règlement. Le rapport tel qu’il est publié a élargi les données dans trois des dix sujets traités. Elles seront davantage élargies dans cinq autres sujets l’année prochaine. Les classements Doing Business sont maintenant basés sur la distance de la frontière. Chaque économie des 189 pays concernés est évaluée en fonction de la proximité de leurs réglementations des affaires aux meilleures pratiques mondiales. Un score plus élevé indique un environnement d’affaires plus efficace et des institutions juridiques solides.