Maurizia Tovo: « Les problèmes des déplacements forcés concernent en même temps l’assistance humanitaire et le développement »

Elle vient de commettre une étude sur les populations obligées de quitter leurs terres dans la région des Grands Lacs, avec la collaboration  du Haut-commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR).  

BUSINESS ET FINANCES : Quel est l’objet de ce travail entre la Banque mondiale et le HCR ?  

MAURIZIO TOVO : C’est une restitution d’une étude régionale effectuée dans les Grands Lacs  sur les déplacements forcés des populations. Nous l’avons réalisée avec le HCR parce que, justement, c’est très important que les humanitaires et les agences de développement travaillent ensemble. Dans ce cas particulier, c’est surtout à cause du fait que les problèmes des déplacements forcés concernent en même temps l’assistance humanitaire et le développement.

Quel rôle a joué chacune de vos deux institutions dans la réalisation de l’étude ?

Nous avons vraiment travaillé ensemble car c’était un travail d’équipe. Aucune de nos deux organismes n’a travaillé pus que l’autre. Globalement, c’est un effort commun pour, en quelque sorte, le bon exemple.

Quand avez-vous commencé cette étude et combien de temps a-t-elle duré ?    

Elle a démarré en décembre 2013. L’essentiel du travail a été effectué au printemps 2014, avant d’être finalisé en décembre de la même année.

Comment se présente la situation des réfugiés dans la région des Grands Lacs, en général, et en République démocratique du Congo, en particulier ? 

Dans la région des Grands Lacs, il y a une caractéristique. C’est l’échange des réfugiés. C’est-à-dire que les réfugiés d’un pays vont dans un autre et vice  versa. C’est, donc un problème à l’échelle régionale. De tous les réfugiés de la région des Grands Lacs, 82 % sont originaires des pays mêmes des Grands Lacs. Pour ce qui est de la RDC, en particulier, elle est le cinquième pays parmi ceux qui ont deux grandes lois sur les déplacés internes, et même au niveau mondial, en termes de taille des populations déplacées à l’interne.

Dans votre étude vous avez parlé des compétences des réfugiés que l’on peut exploiter. Qu’est-ce à dire ?  

Avant de se déplacer, ils étaient quand même des gens productifs, avec des métiers, des revenus… Le fait qu’ils aient été obligés de fuir de chez eux ne veut pas dire qu’ils ont complètement perdu tout leur savoir. Ils peuvent encore faire des choses, apprendre des nouvelles techniques ou acquérir des nouvelles connaissances auprès des populations d’accueil. Et ils peuvent valablement utiliser leurs connaissances et leur force de travail pour rester autonomes.

Pourquoi les réfugiés sont-ils vulnérables ? 

D’abord, c’est parce qu’ils ont dû fuir et tout abandonner. Ils se retrouvent sans rien, ayant perdu leurs moyens de subsistance. S’ils étaient des paysans, ils n’auraient pas pu emporter leurs champs, encore moins leur bétail. Donc, ils ont perdu leur gagne-pain et sont devenus dépendants. Ensuite, ce sont souvent des gens qui ont des vulnérabilités particulières, qui ont subi des violences, des traumatismes. Ils ont besoin d’une attention particulière.

Parce que les déplacements des populations sont forcés, que doit-on faire pour les empêcher ? 

Ce dont nous nous occupons, ce sont les déplacements liés à la violence et aux conflits. Pour les empêcher, il faut mettre fin aux violences et aux conflits. Évidemment, ce n’est pas facile. Mais il faut aussi s’attaquer aux causes.

Propos recueillis par Hubert Mwipatayi